Homélie du 3e dimanche de l’Avent – année A

La première bougie que nous avons allumée était celle de la vigilance, la deuxième, celle de la conversion, la troisième est celle de la patience!

Comme il est difficile d’être patient, dans un monde où l’on veut « tout, tout de suite », où l’on nous fait croire que tout est accessible, ici et maintenant.

La patience n’est pas, de loin, la vertu que notre société cultive le plus. Qui, aujourd’hui, économise avant d’acheter, disons, une nouvelle voiture? Non, on va voir sa banque pour obtenir un prêt, ou l’achète en leasing, et peu importe si, au final, on la paie plus cher, mais au moins on l’a tout de suite… Nous approchons de Noël: combien de magasins nous disent: achetez maintenant, vous commencerez à payer en janvier! Vous avez entendu une chanson qui vous plaît, vous allez sur un site où vous pouvez la télécharger en quelques secondes…

Cette impatience vaut aussi pour les actes quotidiens de notre vie: qui n’a pas pensé, ou dit, cette phrase un peu ubuesque: Je cours après le temps…, oui vous pouvez toujours essayer de courir, vous ne parviendrez pas à le rattraper! Ou alors dites-moi comment vous faites, ça m’intéresse!

L’impatience pourrait bien être un des maux les plus pernicieux de notre société; elle est l’antichambre de la convoitise: la convoitise, en effet, nous fait ressentir comme une frustration l’objet que je convoite sans pouvoir en jouir immédiatement. La frustration conduit à la colère, la colère à la jalousie - car il y a toujours un autre qui a ce que je convoite -,  je peux même arriver à penser que j’ai droit à ce que je convoite, et que, si je ne l’ai pas, je peux légitimement recourir à la violence pour m’en emparer!

Voyez où l’impatience peut nous mener!

Quel est l’antidote à cette impatience, qui nous fait nous agiter pour forcer le futur?

Saint Jacques nous en parle dans sa lettre: la patience, la patience, oui, mais sur le modèle de l’endurance:

Frères, prenez pour modèles d’endurance et de patience les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur.

Endurance et patience: pour le dire autrement, il faut que la patience se déploie dans l’endurance: voyez, il ne s’agit pas d’une patience passive, encore moins de résignation, mais d’une patience active.

C’est quoi une patience active?

C’est croire que ce que j’attends est déjà là… Pour nous le faire comprendre, Jacques utilise cette petite parabole emprunté à la vie agricole: le cultivateur a semé, il sait qu’il ne peut pas forcer le temps de la récolte, mais il sait que ce moment-là va venir, et il le guette: il est attentif à la moindre pousse qui sort de terre. Et déjà il se réjouit de voir ce qui commence à germer.

Mettez dans votre vie une patience active. Et vous verrez combien les choses changeront, combien votre rapport aux gens changera.

Si je transpose cette parabole dans le quotidien, un quotidien plus proche de nous, qui habitons la ville. Voyez cette femme qui s’impatiente du fait que le caractère colérique de son mari ne s’est pas atténué malgré 20 ans de mariage au compteur, et qui a fini par baisser les bras… Mais madame, ça ne marche pas comme ça! Votre mari ne changera pas du fait de vos efforts! Il changera si vous savez regarder chez lui les efforts qu’il fait pour changer, et si vous êtes capable de l’en remercier, et de recevoir ces efforts, si petits soient-ils, comme un acte d’amour à votre égard. Regardez ce père de famille qui s’impatiente du fait que son fils ramène une fois de plus un bulletin déplorable, et qui désespère de lui… Ce n’est certainement pas en le cassant ou en l’humiliant, en le traitant d’incapable, que cela arrangera les choses. Mettez-vous en mode de patience active: il y a sûrement dans ce bulletin déplorable des petits signes que, ici ou là, il a fait des efforts; c’est ça qu’il faut voir et faire ressortir: c’est regarder votre enfant en sachant qu’il peut faire mieux, 
c’est avoir foi en lui peut-être plus que lui-même a foi en lui, et le lui dire: c’est un acte d’amour envers vos enfants!

Et puis, bien sûr, prends patience avec toi-même: ça, c’est peut-être le plus difficile! 
Nous sommes souvent extrêmement sévères avec nous-mêmes, et nous sommes les premiers, parfois, à nous condamner, à nous juger.

Là, il n’y a qu’une seule chose à faire: la prière: te mettre devant le Seigneur, car lui voit plus loin que toi: il ne voit pas l’être que tu es à l’instant « T » mais l’être que tu peux devenir si tu prends patience avec toi-même.

Entre dans une patience active, découvre en toi ces talents qui sont peut-être encore enfouis et dont tu n’as pas pris encore conscience. Ouvre ton cœur au Seigneur, lui-même te fera voir ce qui se prépare en toi, dans le silence, et qui fera qu’un jour, tu deviendras un homme, une femme, responsable et pleinement libre.

Aie confiance, Dieu te fais confiance, et il te connaît mieux que toi-même, car c’est lui qui t’a façonné dans le secret; Dieu veut accomplir en toi de grandes choses. Mais prends patience! Entre dans la patience de Dieu!

Amen.